Chevery, 5 décembre 2024 – Avec un seul lien routier la reliant au reste de la province et près du tiers de son territoire accessible seulement par bateau ou avion, il est indéniable que la Côte-Nord fait face à des enjeux considérables de mobilité.
Derrière chaque maigre avancé dans le dossier des transports régionaux se trouve des années de mobilisation des élus et des citoyens pour convaincre les gouvernements du bien-fondé d’offrir des services de base à la population nord-côtière.
Nous ne pouvons donc que déplorer les critiques de certains groupes se présentant comme protecteurs de l’environnement traduisant une mauvaise connaissance du territoire ou une indifférence face aux enjeux nord-côtiers.
Rappelons que certaines de ces organisations ont ultimement pour mission de protéger une ressource unique exploitée par leurs membres.
Les commentaires récemment exprimés par ces organisations dans divers médias concernant le prolongement de la route 138 entre Tête-à-la-Baleine et La Tabatière trahissent cette incompréhension des particularités locales et une indifférence totale face aux besoins des citoyens de ces territoires. La Basse-Côte-Nord est en grande partie couverte de tourbières et une analyse environnementale honnête se doit de séparer l’impact de la construction d’infrastructures en zones humides des autres effets potentiels sur l’environnement. Mentionnons au passage que les montaisons de saumon ont été difficiles cette année dans la grande majorité des rivières québécoises, sans égard à la présence de chantiers et qu’au contraire, plusieurs cours d’eau sont demeurés dans les dernières décennies d’excellentes rivières à saumon malgré la présence de ponts et de routes.
Par ailleurs nous renouvelons notre confiance envers les agents de la faune qui sont déjà présents sur nos territoires afin de faire respecter les règles de chasse et de pêche en vigueur de même qu’envers les experts gouvernementaux pour déterminer les meilleurs tracés routiers possibles.
Les intervenants de ces groupes de pression oublient aussi de mentionner l’impact environnemental de l’offre actuelle de transport et de logistique. En l’absence de liens routiers, tous les transports se font par avion ou bateau, qu’il s’agisse du transport de personnes, de la nourriture, de la poste, des matériaux de construction, de médicaments, de véhicules, de meubles ou de n’importe quel article. Ces moyens de transport ont un impact environnemental non négligeable, surtout lorsqu’il s’agit de desservir des communautés éloignées.
En plus d’améliorer l’efficacité énergétique de l’approvisionnement en région isolées, le désenclavement ouvrira de nombreuses possibilités pour diminuer l’impact environnemental des communautés, par exemple en facilitant le recyclage et le compostage à l’échelle régionale en plus d’ouvrir des possibilités de développement économique durable.
Plus grave encore, nous craignons que les objections exprimées reflètent une vision urbano-centriste qui ultimement propose de mettre les territoires naturels des régions éloignées sous une cloche de verre au détriment des populations locales qui occupent ces régions.
Aujourd’hui, il ne s’agit plus d’opposer le développement économique à la protection de l’environnement, mais de permettre de construire des communautés résilientes qui sauront affronter les défis nombreux qui les frapperont demain.
Par-dessus tout, il serait faux de penser que nous sommes indifférents face aux enjeux environnementaux. Les municipalités de la MRC du Golfe-du-Saint-Laurent sont impliquées dans plusieurs projets pour faire de leurs communautés des milieux de vie plus verts. Nos élus et notre population sont conscients plus que quiconque des enjeux des changements climatiques, notamment avec les impacts répétés que ceux-ci ont sur nos transports régionaux.
Nous chérissons tous notre territoire nord-côtier : de ses cours d’eau jusqu’à la taïga, en passant par ses tourbières et ses montagnes, mais aussi précieuse que puisse être la virginité de ses rivières, celle-ci n’a aucune valeur s’il ne reste plus de communautés environnantes pour les admirer.
Sur ce point, il vaut la peine de rappeler que la Côte-Nord continue de se vider de sa population avec un bilan migratoire négatif et que la situation est encore plus aiguë dans les secteurs sans liens routiers.
L’accessibilité difficile est un irritant majeur qui affecte sérieusement l’attractivité de la région.
La construction d’infrastructures de base telles que des routes et des ponts est une condition essentielle pour assurer la résilience de notre territoire pour les années à venir. Au final, notre estimons tout simplement que les Nord-Côtiers, comme tous les autres Québécois, ont droit d’occuper leur territoire, de s’y déplacer et d’utiliser ses richesses durablement.
Si ces discussions sur la protection de l’environnement sont saines à avoir et peuvent être constructives, nous invitons les groupes de protection de l’environnement à analyser la situation dans son ensemble, à long terme et en tenant compte de l’ensemble des facteurs humains et territoriaux propres à la Côte-Nord.
Source : Madame Gladys Driscoll Martin
Préfète
418 787-2016
info@mrcgsl.ca